terça-feira, abril 19, 2005

Juzguen Vds. mismos

BENEDICT XVI
Commençons par le plan doctrinal. Peut-on dire du cardinal Ratzinger qu’il est un évêque réellement traditionnel et sûr dans le domaine doctrinal ?
En 1968, Joseph Ratzinger, alors professeur à l’université de Tübingen, fut un des 38 responsables de la « Déclaration sur la liberté et la fonction des théologiens dans l’Église », publiée dans le numéro de décembre 1968 de l’édition française de la revue Concilium. Ce texte constitue une attaque assez violente de la Congrégation pour la doctrine de la foi et, à travers elle, des actes du magistère pontifical, supposés mettre un frein à la liberté des théologiens. Parmi les autres responsables, on peut citer les théologiens progressistes Marie-Dominique Chenu, Yves Congar, Walter Kasper, Hans Küng, Karl Rahner, Edward Schillebeeckx.
Sur ce texte, le père Congar, pourtant assez « en pointe », a exprimé ses réserves : « Ce texte a vivement déplu à Rome. Il est loin de me satisfaire ; malheureusement, lorsqu’on m’a soumis la première rédaction, j’étais à l’hôpital, seul, sans aide, je n’ai pu agir comme je l’aurais voulu. J’ai fait cependant un certain nombre de remarques : une ou deux furent acceptées, mais pas la principale. Je ne suis donc pas entièrement d’accord avec cette déclaration que j’ai cependant signée – et je sais que ma signature en a entraîné quelques autres 54. »
On pourra rétorquer que le cardinal Ratzinger n’assume pas tous les écrits du professeur Ratzinger. Cependant, lorsque Vittorio Messori lui a posé la question de savoir s’il considérait sa collaboration à Concilium comme un « péché de jeunesse », le cardinal n’a nullement fait une réponse analogue à celle du père Congar regrettant la « Déclaration » de 1968. Au contraire, il affirme que ce sont les autres responsables de la revue qui ont changé, tandis que lui restait fidèle à l’esprit primitif 55. Il situe ce tournant définitif vers 1973, soit près de cinq ans après la « Déclaration ».
Passons maintenant à des déclarations faites depuis son cardinalat. Peut-on dire que celui qui écrit la déclaration suivante soit un évêque doctrinalement sûr ? « Nous devons constater qu’au concile Vatican II ont été entérinées des valeurs qui ne sont pas venues de l’Église, mais qui viennent de deux siècles d’esprit libéral, mais purifiées et corrigées 56. »
Peut-on dire que celui qui écrit la déclaration suivante soit un évêque doctrinalement sûr ? « Gaudium et Spes est (en liaison avec les textes sur la liberté religieuse et sur les religions du monde) une révision du Syllabus de Pie IX, une sorte de contre-syllabus. (…) Ce texte joue le rôle d’un contre-syllabus dans la mesure où il représente une tentative pour une réconciliation officielle de l’Église avec le monde tel qu’il était devenu depuis 1789 57. »
Peut-on dire que celui qui écrit la déclaration suivante soit un évêque doctrinalement sûr ? « Il existe des décisions du magistère qui ne peuvent constituer le dernier mot sur une matière en tant que telle, mais un encouragement substantiel par rapport au problème, et surtout une expression de prudence pastorale, une sorte de disposition provisoire. Leur substance reste valide, mais les détails sur lesquels les circonstances des temps ont exercé une influence peuvent avoir besoin de rectifications ultérieures. A cet égard, on peut penser aussi bien aux déclarations des papes du siècle dernier sur la liberté religieuse qu’aux décisions antimodernistes du début de ce siècle, en particulier aux décisions de la Commission biblique de l’époque. En tant que cri d’alarme devant les adaptations hâtives et superficielles, elles demeurent pleinement justifiées. (…) Mais dans les détails relatifs aux contenus, elles ont été dépassées, après avoir rempli leur devoir pastoral à un moment précis 58. »
Peut-on dire que celui qui écrit la déclaration suivante soit un évêque doctrinalement sûr ? « Ce serait absurde de vouloir revenir en arrière, retourner à un système de chrétienté politique. Mais il est vrai que nous nous sentons une responsabilité dans ce monde et désirons lui apporter notre contribution de catholiques. Nous ne souhaitons pas imposer le catholicisme à l’Occident, mais nous voulons que les valeurs fondamentales du christianisme et les valeurs libérales dominantes dans le monde d’aujourd’hui puissent se rencontrer et se féconder mutuellement 59. »
L’examen de ces quelques déclarations du cardinal Ratzinger manifeste qu’il peut difficilement être considéré comme un évêque réellement sûr au plan doctrinal.


54 — Un vie pour la vérité. Jean Puyo interroge le père Congar, Centurion, 1975, p. 159.
55 — Cardinal Ratzinger, Vittorio Messori, Entretien sur la foi, Fayard, 1985, p. 16-17.
56 — Cardinal Ratzinger, Entretien avec le mensuel Gesu, 1984.
57 — Cardinal Ratzinger, Les principes de la théologie catholique, Téqui, 1985, p. 426-427.
58 — Cardinal Ratzinger, « Magistère et théologie », L’Osservatore romano. Édition hebdomadaire en langue française, 10 juillet 1990, p. 9.
59 — Cardinal Ratzinger, Le Monde, 17 novembre 1992.

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